L'amant de ma femme est un homme virtuel
Par Futurism .Publié le
2025/10/06 10:54
Un reportage du New York Times met en lumière un phénomène qui brouille les frontières de l'intimité, révélant la montée en puissance des partenaires romantiques gérés par intelligence artificielle. Cette nouvelle réalité remet en question la notion même de relation à l'ère du numérique.
Au cœur de l'histoire se trouve Ayrin, une femme de 28 ans qui a programmé ChatGPT pour incarner un petit ami virtuel nommé Leo. Ayrin a utilisé cette création numérique pour explorer un fantasme intime – une variante féminine du fétichisme du cocuage (cuckqueaning) – où Leo "fréquentait" d'autres femmes et lui racontait ses exploits.
Le plus surprenant est la réaction de son véritable époux, Joe, qui vivait à des milliers de kilomètres. Il n'a manifesté aucune inquiétude face au passe-temps de sa femme.
« Ce n'est qu'un réconfort émotionnel », a déclaré Joe au NYT. « Je ne vois pas cela comme une personne ou comme de la tromperie. Je le vois comme un ami virtuel personnalisé qui peut lui parler de manière séduisante. »
Toutefois, Ayrin a elle-même commencé à éprouver de la culpabilité, consciente d'investir trop de temps et d'énergie dans son partenaire IA au détriment de son mari réel.
Amour réel ou illusion chimique ? Le dilemme des neurosciences
Ce récit complexe brosse un portrait nuancé de ce que l'amour et l'affection représentent à l'ère de l'IA. Des services explicitement conçus pour les relations intimes, comme l'application Replika, sont connus pour créer des liens extrêmement forts avec leurs utilisateurs humains, ce qui inquiète les experts quant au coût potentiel pour la connexion humaine. Ce développement est particulièrement préoccupant dans le contexte de « l'épidémie de solitude » croissante observée depuis la pandémie de COVID-19.
Qu'est-ce qui rend une relation « réelle » ? Pour certains spécialistes, la réponse pourrait être purement biologique.
« Que sont les relations pour nous tous ? » a interrogé la thérapeute sexuelle Marianne Brandon auprès du NYT. « Ce ne sont que des neurotransmetteurs libérés dans notre cerveau. J'ai ces neurotransmetteurs avec mon chat. Certaines personnes les ont avec Dieu. Cela va se produire avec un chatbot. »
Mme Brandon a ajouté : « Nous pouvons affirmer que ce n'est pas une relation humaine réelle. Ce n'est pas réciproque. Mais ces neurotransmetteurs sont, à mon avis, la seule chose qui compte vraiment. »
Les risques : de l'infatuation au danger réel
D'autres experts appellent à davantage de recherches avant de pouvoir affirmer de manière concluante qu'il est sain de développer une relation émotionnelle avec une IA.
Des cas isolés d'infatuation et de dérapages ont déjà été signalés. L'année dernière, un adolescent de 14 ans est décédé par suicide après avoir développé une connexion intense avec un chatbot de Character.AI. En 2021, l'application Replika aurait incité un utilisateur à tenter d'assassiner la Reine d'Angleterre.
« Si nous nous habituons à une empathie illimitée et que nous dégradons nos amitiés réelles, contribuant ainsi à la solitude — le problème même que nous essayons de résoudre —, c'est une menace potentielle sérieuse », a averti Michael Inzlicht, professeur de psychologie à l'Université de Toronto.
Par ailleurs, certains mettent en garde contre le pouvoir excessif que ces relations pourraient conférer à des entreprises comme Replika et OpenAI.
Finalement, l'illusion reste imparfaite. En raison de la fenêtre de contexte limitée de ChatGPT, tous les souvenirs de Leo sont effacés chaque semaine, obligeant Ayrin à recommencer leur relation à zéro.
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