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les 7 nouvelles formes de journalisme issues du numérique


Par Flavien Chantrel .Publié le 2025/01/07 00:22
 les 7 nouvelles formes de journalisme issues du numérique
Janvier. 06, 2025
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Julien Kostrèche, co-fondateur du Ouest Médialab, présentait  sa vision des 7 formes de journalisme qui ont émergé avec le numérique.

Loin de tuer le journalisme traditionnel, Internet a permis de renouveler le genre en proposant de nouveaux formats, de nouveaux concepts, de nouvelles formes d’expression, Julien Kostrèche, co-fondateur du Ouest Médialab, a dressé un panorama étayé d’exemples sur ce renouveau. Il a présenté 7 familles de journalisme numérique, et la manière dont ils changent la donne. Voici les principaux enseignements de sa très riche intervention.

Le journalisme conversationnel

Cela a été un changement lié à l’arrivée d’Internet. Avant le web, les occasions d’échanger avec le public étaient rares. La conversation est désormais devenue permanente. Cela a d’ailleurs créé des dérives, avec l’arrivée de trolls divers et variés, qui ont nécessité l’arrivée de community managers ou de prestataires de modération (parfois basés à l’étranger pour faire baisser les coûts). Face à ces débordements, certains ont tout simplement fermé leurs commentaires. D’autres font la marche inverse, comme Nice-Matin qui les a rouvert, pour laisser la parole aux lecteurs, ou réservent la possibilité de commenter uniquement à leurs abonnés. La Montagne va plus loin et offre un rendez-vous vidéo sur Facebook, Dans Ton Com, qui éditorialise ces commentaires. Un autre exemple d’appropriation de ces commentaires pour fournir un contenu à valeur ajoutée est La vie du coin, qui valorise les réponses des lecteurs pour offrir des informations à ses visiteurs.

La conversation peut prendre d’autres formes, comme sur les médias sociaux, ou via l’utilisation de robots, comme peuvent le proposer Quartz ou Jam. L’avenir se fera peut-être aussi avec une incursion dans le coaching, comme le fait The Skimm qui permet même de synchroniser son agenda pour avoir des recommandations personnalisées, ou avec les assistants personnels, Le Télégramme étant par exemple présent sur Alexa.

Le journalisme liquide

On ne parle pas seulement ici du diktat de la vitesse et de la mobilité, mais aussi de la modularité et de l’adaptation aux nouveaux usages et aux nouveaux supports. Cela peut se faire sous forme de journalisme à la demande, comme eHow qui répond depuis de nombreuses années aux questions des internautes sur le moteur de recherche. La frontière avec le pur SEO ou les fermes de contenu est parfois fine, il convient de s’en méfier. Le journalisme de bâtonnage en est aussi un effet pervers, avec des plateformes changeant légèrement les dépêches de l’AFP pour publier rapidement des contenus à moindre coût. Ainsi, 64% de l’information en ligne serait du copier/coller !

Une autre famille de journalisme est dédiée aux millenials, avec des sites comme Buzzfeed, Melty, Vice… Ils peuvent aussi bien traiter de sujets légers comme sérieux, en usant des techniques du marketing viral, avec des titres travaillés et vendeurs. On s’approche des pièges à clics, qui font encore plus sensationnaliste et trash. Si l’algorithme de Facebook a un peu calmé le jeu, ce genre de sites fait encore beaucoup d’audience.

Les formats vidéo à tendance sociale et explicative, incarnés par Vox ou Brut et qui mêlent archives, infographies ou interviews, se sont multipliés ces dernières années. De même que l’information en mode stories, avec notamment les déclinaisons Snapchat des médias comme L’équipe, France TV ou Le Figaro. Ce nouveau mode de narration se fait en vertical, avec des journalistes qui travaillent avec des graphistes et des motions designers.

Enfin, de nombreux médias reprennent les codes du web, comme FlashTweet sur Twitter, avec une utilisation forte des émoticônes et une adaptation au support. Dans la même veine, Le Drenche fait des résumés des actualités de la semaine en gifs, et la Charente Libre adopte les codes des YouTubeurs dans des rendez-vous vidéos.

Le journalisme live

Il a réellement débuté avec Twitter et la généralisation du live-tweet. Presse-Océan utilise ce format régulièrement, quand Le Monde fait des live-tchats via un outil dédié qui peut accueillir des dizaines de milliers de personnes en même temps. Les formats sont courts, rapides et régulièrement actualisés.

Le Facebook-live a démocratisé la vidéo, beaucoup de médias qui n’utilisaient pas ce format ont débuté avec cet outil. Rémy Buisine sur Brut est un très bon exemple du genre, avec un style très authentique et directe. Des limites se posent tout de même en matière de modération. Les smartphones aident aussi à la démocratisation, le Figaro les utilise par exemple avec un studio dédié. Les radios sont également utilisatrices, en ajoutant des caméras à leurs émissions. Le journalisme mobile se développe fortement de manière générale, comme sur la chaine de télévision suisse Léman Bleu. Ajoutons les streamers qui se mettent au journalisme, comme la chaine Twitch Accropolis, qui a reçu plusieurs ministres du gouvernement pour un débat live.

Le journalisme au long cours

Il est une réponse directe au temps réel et à l’accélération. C’est réjouissant de voir que des formats longs se développent et trouvent leur public sur Internet. Cela peut concerner les webdocs, webfictions, webséries, qui demandent des moyens importants et qui ont des modes de rédaction plus linéaires. Prenons pour exemple Do Not Track d’Arte ou Les nouveaux pauvres, reportage sur les habitants de Bruxelles réalisé avec la RTBF. Ces projets sont souvent télévisuels et assez chers à produire.

Dans la presse, les longs formats en « scrolly-telling » sont privilégiés. Des formats interactifs enrichis utilisés par L’équipe Explore, le New York Times depuis 2016, mais aussi la Voix du Nord. Ils permettent souvent de fidéliser ou de convertir des abonnés avec des accès payants. Cela fonctionne également bien avec des enquêtes, comme le font The Conversation, Mediapart ou ThinkerView et ses 350 000 abonnés.

Et évidemment, le podcast est concerné avec la réécoute des radios, mais aussi des sites comme Louie Media ou Binge.audio qui offrent des programmes diffusés en natif. Les médias écrits investissent dans ce format, comme Les Echos, Le Parisien, La Croix, Le Télégramme ou Ouest-France.

Les longs formats arrivent même sur Twitter avec l’apparition des threads, ces enchainements de tweets qui forment un récit narratif plus long.

Le journalisme collaboratif

Le public peut parfois être plus expert que les médias eux-mêmes sur certains sujets, il est donc logique de les voir intégrés dans certains modèles de sites. C’est le cas des plateformes de blogs, qui ouvrent la publication sur certains espaces. Nice-Matin se sert de son côté de Facebook pour valoriser les contributions de ses lecteurs, quand France 24 fait appel à un réseau d’observateurs  et certains sites se servent de leurs utilisateurs pour faire remonter des données précises qu’ils centralisent ensuite (lors de pénuries d’essence par exemple).

Mieux encore, certaines communautés deviennent elles-même des médias. C’est le cas de C’est à Cherbourg, qui a donné naissance à une édition papier tirée à 25 000 exemplaires. Et n’oublions pas le cas du fact-checking collaboratif, comme cela a été le cas lors de l’affaire des Panama Papers.

Le data-journalisme

S’il n’est pas nouveau , le data-journalisme s’est fortement imposé à partir des années 2010, avec le développement de l’open data et des nombreux outils qui permettent de trier les données ou de les visualiser. Le New York Times a été précurseur, mais désormais la plupart des grandes rédactions ont une équipe dédiée. Les décodeurs du Monde en sont un bon exemple. Les rédactions locales ne sont pas en reste, avec des initiatives du Télégramme et de Ouest-France sur la transformation de la ville de Brest ou sur les l’origine des signatures obtenues par les candidats à la présidentielle. Le motion design en télé ou des formats optimisés pour mobile sont d’autres exemples de développement de ce data-journalisme qui est bien plus qu’un effet de mode.

L’analyse automatique de textes, des programmes permettant de combattre des fake news ou encore des robots rédacteurs permettent d’automatiser la production d’articles simples reposant sur des modèles, comme le propose la startup Syllabs, sont d’autres exemples de l’importance croissante de la robotisation et de la data dans le journalisme.  Finissons par Flint, le robot dénicheur d’articles de qualité, ou par les présentateurs virtuels qui sont déjà en Chine, et on voit que le futur du journalisme sera (en partie) automatisé.

L’immersif

En parallèle du live s’est développé la notion de journalisme immersif. Second Life en a été un symbole il y a une dizaine d’années avec des initiatives marquantes, mais on peut également parler de l’immersion 360 qui permet de se plonger dans un lieu ou décor, et dans lequel se sont spécialisées plusieurs agences, de l’immersif par le drone ou encore de l’immersif dans la rue avec des médias comme Taranis News. Dernière tendance en date, la gamification de l’information, avec la sorti récente de Betty.news qui permet de parier sur l’actualité.

Le prochain défi pour le journalisme numérique ? Gagner la bataille de la confiance et ainsi renouer le lien entre journalistes et lecteurs. Une toute autre histoire, avec de nouveaux défis.

    Source : blogdumoderateur

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