Une nouvelle startup de FIV prétend pouvoir prédire le QI d'un embryon
Par Futurism .Publié le
2025/08/03 17:28

Août. 03, 2025
Le XXIe siècle a vu l'émergence spectaculaire des startups, passant d'une niche relativement spécialisée à un phénomène mondial de plusieurs milliers de milliards de dollars, qui impacte l'économie et la société comme jamais auparavant. Au cœur de cette vague technologique, les entreprises génétiques émergent comme de nouveaux acteurs provocateurs, promettant de briser les barrières de la compréhension humaine de la vie elle-même, tout en soulevant de profondes questions éthiques et sur notre avenir.
Entre 2021 et 2023, les startups ont généré une valeur mondiale estimée à 7 600 milliards de dollars. De 2019 à 2023 — une période tumultueuse pour l'économie dans son ensemble — le nombre de startups aux États-Unis a tout de même augmenté de 16 %.
Mais avec tout ce succès vient une bonne dose de risque. On estime que plus des deux tiers des startups ne parviennent pas à offrir un retour sur investissement positif à leurs investisseurs. Beaucoup échouent avant même de générer le moindre profit.
Ce taux d'échec pousse les futurs entrepreneurs à tester des idées, même les plus farfelues. Ces derniers mois, nous avons ainsi eu droit à des entreprises "inspirantes" comme une application de "loue-voyou", un réveil lucratif, ou même une caméra dotée d'IA qui analyse les excréments.
Herasight : une nouvelle entreprise génétique qui fait rougir Charles Davenport
À ce mélange s'ajoute une nouvelle startup "génétique" étincelante qui ferait rougir Charles Davenport : Herasight.
Herasight a été dévoilée par les généticiens Tobias Wolfram et Alex Strudwick Young, qui ont récemment annoncé que l'entreprise sortait de son "mode furtif", une période de développement secret que les startups utilisent pour protéger leur propriété intellectuelle. Lors de cette annonce, Young a présenté l'entreprise comme une "startup de fécondation in vitro (FIV)", affirmant qu'elle pouvait prédire la probabilité de développer 17 maladies différentes au sein d'un ensemble d'embryons donné.
Dans un message sur X (anciennement Twitter), Young a affirmé qu'Herasight avait déjà "criblé des centaines d'embryons". Son annonce était accompagnée d'une capture d'écran d'un widget interactif développé par l'entreprise — qui incluait une autre mesure frappante : une plage d'intelligence pour prédire le QI d'un bébé.
Pour utiliser le widget et prédire le QI, les utilisateurs sélectionnent d'abord "intelligence" dans une liste de traits et de maladies incluant la schizophrénie, le mélanome et la goutte. Ensuite, les utilisateurs choisissent l'ascendance raciale de la mère et du père, ainsi que le QI moyen de la famille. À partir de là, il suffit d'entrer le "nombre d'embryons" — de 3 à 20 — et de laisser l'algorithme opérer sa magie.
Dilemmes éthiques et scientifiques
Bien que le dépistage d'embryons pour des traits comme le QI soit techniquement légal aux États-Unis, cette pratique est interdite dans d'autres pays comme le Royaume-Uni. De nombreux scientifiques soulignent d'ailleurs le manque de preuves que le dépistage embryonnaire puisse réellement prédire des traits comme la taille ou l'intelligence.
Pourtant, quand la science douteuse a-t-elle jamais freiné une startup ?
"Aujourd'hui, nous sortons de notre mode furtif avec un article montrant que nos prédicteurs pour 17 maladies — validés au sein des familles — surpassent la concurrence, avec des performances améliorées chez les non-Européens", s'est réjoui Young sur X.
De son côté, le collaborateur de Young, Wolfram, est resté discret sur l'annonce, préférant republier des articles de presse positifs.
"D'un point de vue commercial, avoir des enfants est l'une des rares fois où les gens réfléchissent sérieusement à la génétique, et cette application particulière est aussi un cas rare où les résultats génétiques sont directement exploitables", s'enthousiasmait l'un des messages de félicitations.
Génome humain et reproduction sélective : les tentatives de "repackaging"
L'équipe Herasight a également publié un livre blanc détaillant les différences entre leur travail et d'autres projets d'eugénisme, comme la plateforme de FIV par abonnement Nucleus Genomics, ou Orchid, qui aurait été utilisée par le milliardaire Elon Musk pour engendrer au moins un de ses enfants.
Le document révèle les tentatives de l'équipe Herasight de "repacker" le sujet hautement controversé de la reproduction humaine sélective. Les auteurs prennent soin de faire des concessions aux "préoccupations bioéthiques" de leur modèle économique, comme le fait que le dépistage génétique a une chance très réelle d'aggraver les inégalités dans le monde réel.
"Malgré ces préoccupations méthodologiques, les validations complètes des [dépistages] de maladies de pointe restent rares... et aucune n'emploie de stratégies de validation intrafamiliale pour distinguer les effets génétiques directs des facteurs de confusion au niveau de la population", peut-on lire dans une section. "Pour combler ces lacunes, nous avons construit dix-sept [dépistages] de maladies... et nous avons rigoureusement évalué leur performance prédictive dans des contextes basés sur la population et intrafamiliaux."
En d'autres termes : bien qu'il n'y ait peut-être aucune preuve scientifique que des traits comme l'intelligence puissent être "réglés" comme un piano, et que le concept tout entier sente l'eugénisme, nous faisons très attention, contrairement à nos concurrents.
Si les auteurs reconnaissent prudemment les limites techniques du dépistage génétique et de la recherche qu'il englobe, ils ne parviennent pas à aborder le fondement eugéniste de leur startup — un manque révélateur, et probablement éclairant pour l'avenir de la reproduction humaine.
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