le choix de Time provoque un séisme sur les marchés de prédiction
Par Victor Tangermann .Publié le
2025/12/22 21:03
Décembre. 22, 2025
Comme à son habitude, et au mépris de toute attente conventionnelle, le magazine Time a pris de grandes libertés avec son édition annuelle de la "Personnalité de l'année".
En plus de restreindre l'accès à son site via un chatbot d'intelligence artificielle, l'hebdomadaire a sacré les « architectes de l'IA » comme les visionnaires les plus marquants de 2025, redéfinissant — ou plutôt ignorant — une fois de plus la notion même de « personne ».
Cette annonce, accueillie par une vague d'incrédulité et de nombreux roulements de yeux, intervient dans un contexte de critiques acerbes. En cause : les investissements pharaoniques dans les centres de données, leur empreinte carbone colossale et la litanie de dilemmes éthiques engendrés par l'essor de l'IA générative.
La fureur des "prophètes" du pari
Si l'annonce a fait jaser, un groupe en particulier a vu rouge. Comme l'a souligné l'autrice Parker Molloy sur Bluesky, ceux qui avaient misé des sommes astronomiques sur l'identité du lauréat via les marchés de prédiction sont aujourd'hui en plein désarroi. Un rappel brutal des risques inhérents à ces plateformes de jeu non régulées.
« Quelqu'un peut-il m'expliquer en quoi ce n'est pas une arnaque ? » s'est insurgé un utilisateur après avoir parié sur Elon Musk via la plateforme Kalshi. « Le titre de "Personnalité de l'année" est censé être singulier... »
Pour d'autres parieurs, le magazine a simplement "joué sur les mots". Ceux qui avaient misé sur l'entité « IA » estiment que Kalshi leur doit réparation, arguant que l'IA figure littéralement sur la couverture et dans le titre. Pourtant, le règlement est clair : si le titre n'est pas attribué à une personne physique mais à une catégorie ou une technologie, les critères de paiement deviennent caducs.
20 millions de dollars partis en fumée
L'enjeu n'était pas symbolique : ce marché a généré près de 20 millions de dollars de mises depuis début novembre 2024. Longtemps favori, Elon Musk s'était fait ravir la vedette par Jensen Huang, le PDG de Nvidia, dont la ferveur pro-IA lors d'un discours à Washington avait séduit les spéculateurs.
Sur la plateforme Polymarket, les tensions ont viré à la guerre ouverte. Certains utilisateurs, ayant misé sur LeBron James ou Donald Trump, dénoncent aujourd'hui une manœuvre de type « rug pull » (sortie de tapis), se sentant trahis par un intitulé de catégorie qu'ils n'avaient pas vu venir.
L'art du contre-pied signé "Time"
Pourtant, les parieurs auraient dû réviser leurs classiques. Le magazine Time est un habitué des choix disruptifs, voire provocateurs. Après avoir nommé Adolf Hitler en 1938 ou Joseph Stalin en 1939, la publication a souvent étiré la définition de « personnalité » jusqu'à l'absurde. En 1960, le titre fut attribué aux « scientifiques américains », et en 2006, à « Vous » (You), une décision restée dans les annales comme l'une des plus agaçantes de l'histoire de la presse.
Pendant que les marchés de prédiction pansent leurs plaies, les réseaux sociaux savourent le spectacle. Comme le résume avec ironie un internaute sur Bluesky : « J'ai du mal à croire qu'un marché de paris non régulé ait laissé les gens parier de manière frivole pour ensuite rafler toute leur mise. Quelle surprise ! »
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