Pourquoi le nomadisme numérique ne séduit-il pas plus de monde ?
Par Jodie Cook .Publié le
2025/08/31 08:37
De nombreux professionnels à succès aspirent à l'indépendance géographique, mais le simple fait d'y penser les paralyse. Les peurs financières, les liens familiaux et les prétendues contraintes professionnelles servent souvent d'excuses. Pourtant, le travail à distance explose, vivre à l'étranger peut coûter moins cher, et il est possible de recevoir sa famille. Le véritable obstacle est, la plupart du temps, interne. Il est grand temps de remettre en question ses idées reçues, de calculer les vrais coûts et d'explorer le champ des possibles. Le monde s'offre à vous. Serez-vous du voyage ?
Après avoir passé dix ans à vivre en nomade dans 35 villes, j'ai rencontré une quantité incalculable de professionnels compétents qui prétendent vouloir adopter ce mode de vie, mais ne passent jamais à l'acte. Une raison, qu'ils ne parviennent pas à définir, les empêche d'accéder à cette liberté. Ils savent qu'ils peuvent gagner correctement leur vie, travailler de manière autonome et gérer une équipe à distance. Pourtant, ils ne font rien.
Selon une étude de MBO Partners, on dénombrait environ 16,9 millions de nomades numériques américains en 2022, soit une augmentation de 9 % par rapport à 2021 et de 131 % par rapport à 2019, l'année précédant la pandémie. Si les salariés traditionnels représentent 66 % des nomades numériques, cette tendance ne cesse de s'accentuer, et ce, dans toutes les catégories de travailleurs.
Il ne faut pas confondre télétravail et travail à distance. Si vous pouvez être convoqué à tout moment sur un lieu de travail physique, vous n'êtes pas un nomade numérique. En revanche, si vous aspirez à une liberté totale concernant votre lieu et votre manière de travailler, ce mode de vie pourrait bien transformer votre existence.
Si c'est si bien, pourquoi ne sont-ils pas plus nombreux ?
Peut-être que ce mode de vie est fait pour vous. Ou peut-être pas. Voici les principales raisons qui freinent les gens, suivies de pistes concrètes pour vous aider à franchir le pas. À vous de voir de quelles excuses vous souhaitez vous libérer pour élaborer votre propre plan d'action.
Des chaînes invisibles
La peur financière est la plus forte. L'excuse par défaut est souvent « Je n'ai pas les moyens d'être à deux endroits à la fois ». Pourtant, les calculs ne sont pas toujours logiques. Faites le point. Vivre à Paris (ou dans une autre grande ville) et partir en vacances en plus coûte bien plus cher que de vivre ailleurs mois après mois. En tant que nomade, une seule dépense remplace plusieurs factures. Le seuil de liberté financière est bien plus bas que vous ne l'imaginez.
La dépendance géographique semble réelle, jusqu'à ce qu'on la teste. Quand mon agence a commencé à avoir des clients internationaux, j'ai paniqué. Comment allions-nous livrer le travail sans être physiquement sur place ? J'ai vite compris que les clients se soucient des résultats, pas de votre code postal. La qualité du travail ne baisse pas sous prétexte qu'il y a des palmiers à l'extérieur.
Les liens familiaux retiennent beaucoup de personnes. « Je ne peux pas quitter ma mère » se traduit par « Je n'ai pas demandé à ma mère si elle voulait venir me voir au Japon ». Une de mes meilleures amies a donné cette excuse pendant 15 ans. Aujourd'hui, ses parents la rejoignent au Portugal deux fois par an. On peut emmener les gens avec soi.
Le piège de l'année de césure
De nombreux fondateurs écartent le nomadisme sous prétexte qu'ils ont « déjà voyagé ». Ils ont parcouru l'Europe avec leur sac à dos à 21 ans, vécu en auberge de jeunesse et compté leur argent. Il s'agit là de voyage de survie, pas de vie à l'étranger. Travailler depuis un appartement en bord de mer au Cap est totalement différent que de dormir dans un dortoir de 12 lits au Vietnam.
Le stéréotype du nomade numérique perdure : de jeunes vagabonds dans la vingtaine qui gagnent 2 000 dollars par mois en Thaïlande. Mais la réalité est toute autre. Les professionnels confirmés travaillent selon des horaires normaux, conservent leurs habitudes et s'inscrivent dans des salles de sport locales. Des entrepreneurs sont en train de bâtir d'immenses entreprises en tant que nomades. Seul le lieu change, mais le reste reste cohérent.
Le mirage du confort
« J'ai besoin de mes affaires » est l'une des principales excuses. Les gens se convainquent qu'ils ont besoin de certaines marques de shampoing, de tel oreiller ou de telle habitude. J'ai voyagé pendant trois ans avec une seule valise. Votre sentiment de liberté grandit à mesure que le nombre de vos possessions diminue.
L'anxiété du changement touche tout le monde au début. Les nouvelles villes créent un stress latent. Où faire ses courses ? Comment tester la vitesse d'internet ? Où trouver une salle de sport et un espace de coworking ? Ces questions trouvent leur réponse en quelques jours. Des habitudes permettent de réduire l'incertitude. Préparez la même tenue pour l'avion. Réservez des Airbnbs après avoir posé les cinq mêmes questions aux hôtes. Votre routine vous suit partout.
Le problème de l'autorisation
Les contraintes professionnelles bloquent de nombreuses voies. Pourtant, le travail à distance a explosé depuis 2020, la pandémie ayant entraîné une croissance sans précédent : le nombre de nomades numériques ayant un emploi traditionnel a doublé en 2020 et a encore augmenté de 42 % en 2021. Les entreprises n'ont pas eu le choix, elles se sont adaptées ou ont perdu leurs talents. L'obstacle est passé de « ils ne me laisseront pas faire » à « je n'ai pas demandé », un obstacle que l'on s'impose à soi-même.
La peur de l'entrepreneuriat apparaît ensuite. Les chefs d'entreprise craignent que leur société ait besoin d'eux. J'ai ressenti cela profondément lorsque je dirigeais mon agence, persuadée que mon équipe penserait que je les avais abandonnés. En fait, les équipes travaillent mieux avec des limites claires. Les décalages horaires créent des fenêtres de concentration. Votre absence renforce l'autonomie et favorise la création de nouveaux systèmes.
La logistique familiale
Les familles avec des enfants en âge d'être scolarisés peuvent absolument se lancer dans l'aventure. J'ai rencontré des dizaines de familles nomades au cours de mes voyages. La famille Bucket List, Garrett et Jessica Gee, avec leurs trois enfants, ont visité plus de 85 pays tout en travaillant à distance. Ils font l'école à la maison à leurs enfants en utilisant leurs expériences à travers le monde comme outils d'apprentissage.
24 % des nomades numériques américains voyagent avec leurs enfants. Les parents peuvent faire progresser leur carrière tout en faisant découvrir le monde à leur famille. Des organisations comme World Schoolers mettent en relation les familles nomades pour qu'elles partagent leurs ressources et créent des communautés. Les plateformes en ligne permettent de respecter facilement les programmes scolaires tout en offrant une grande flexibilité géographique.
Des aspects pratiques souvent négligés
Si vous souhaitez adopter ce mode de vie, ne laissez pas les aspects pratiques vous décourager. D'autres y sont parvenus, et vous le pouvez aussi.
Les exigences en matière de visa sont la première chose à prendre en compte. Elles varient considérablement, mais sont devenues plus accessibles à mesure que le nomadisme numérique s'est développé. Actuellement, plus de 50 pays offrent des visas spécifiques aux nomades numériques, y compris des destinations populaires comme le Portugal, la Croatie et le Costa Rica. Ces programmes permettent généralement des séjours de 6 à 12 mois avec une preuve de revenu (généralement de 2 000 à 3 000 dollars par mois).
Vérifiez toujours les conditions d'entrée avant de réserver vos vols, car certains pays exigent que les demandes de visa soient faites plusieurs semaines à l'avance.
Les problèmes de santé ne devraient pas vous arrêter. J'ai rencontré de nombreux nomades qui gèrent des maladies chroniques tout en voyageant. Renseignez-vous à l'avance sur les systèmes de santé et les pharmacies locales pour vous assurer que tout ira bien. De nombreux médicaments disponibles dans votre pays d'origine existent ailleurs, parfois sans ordonnance.
Une assurance voyage couvrant les conditions médicales préexistantes est essentielle. Des services comme SafetyWing proposent une couverture santé spécifique aux nomades à partir de 57 dollars par mois.
Pourriez-vous devenir un nomade numérique ? Des questions à vous poser.
Pour vous libérer de ces chaînes, commencez par vous poser des questions. Et si je calculais les coûts de voyage exacts ? Mes parents pourraient-ils me rendre visite à ma prochaine destination ? Mes clients partiraient-ils si je travaillais depuis l'Espagne ? De quels systèmes aurais-je besoin pour travailler n'importe où ?
Le mode de vie de nomade numérique est une réalité, malgré les obstacles. Chaque excuse ne contient qu'une part de vérité. Un déménagement crée des frictions. Le changement génère de l'anxiété. Mais ces sensations disparaissent avec l'action.
Votre ville natale ne vous a pas choisi au hasard parmi près de 200 pays. Vous n'êtes juste jamais parti. Le confort de rester sur place masque le coût de ce que vous manquez en ne voyant pas tout ce que le monde a à offrir.
Quand vous passerez de la question « pourquoi n'y a-t-il pas plus de nomades numériques ? » à « pourquoi rester sur place quand le monde s'ouvre à moi ? », vous comprendrez qu'il n'y a aucune raison de ne pas envisager ce mode de vie. Vos compétences professionnelles sont transposables à l'échelle mondiale. Votre travail est déjà en ligne. L'infrastructure est là pour vous soutenir.
Tout le monde a des raisons de rester. Les nomades numériques ont des raisons d'explorer. La liste qui s'allonge dépend de ce que vous êtes prêt à remettre en question.
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