Le débat fait rage, entre partisans et opposants, sur l’héritage de l’expédition française en Égypte, menée par Napoléon Bonaparte (1798-1801), sur la vie politique, scientifique, sociale et culturelle de l’Égypte, et par conséquent sur le reste du monde arabe.
Les études consacrées à l’expédition française ont pourtant confirmé qu’il s’agissait essentiellement d’une stratégie militaire, économique et culturelle, ce qui est attesté par la présence d’environ 3000 scientifiques, chercheurs et intellectuels dans divers domaines, en plus de son objectif politique de préserver les intérêts de la France en Orient. Il est vrai que nous ne pouvons nier les nombreuses preuves attestant que l’expédition française a contribué à l’émergence d’une renaissance générale en Égypte et dans la région. Cependant, ce qui nous intéresse ici, c’est le domaine culturel, où plusieurs instituts et écoles ont été fondés, des dizaines de missions ont été envoyées en Occident, en particulier en France, et l’imprimerie de Boulaq a été créée en 1822, ainsi que le premier journal égyptien, « al-Waqā’i’ al-Misriyya » (Les Événements d’Égypte) en 1828. Certains chercheurs soulignent que l’École des langues, dirigée par Rifa’a al-Tahtawi (le plus célèbre des envoyés en Occident), s’est activement consacrée à la traduction de centaines d’ouvrages du français, tous publiés par l’imprimerie de Boulaq, ce qui confirme ce renouveau culturel, intellectuel et artistique qui a contribué à ce qu’on appelle la « renaissance culturelle du XIXe siècle » et a renforcé l’influence sur les écrivains et les intellectuels.
D’un point de vue purement culturel, les critiques et les écrivains, dans leurs études et leurs lectures consacrées à l’impact de l’expédition française sur la scène culturelle égyptienne, estiment qu’une grande partie des écrivains et des intellectuels reconnaissent l’influence considérable de cette expédition, en particulier après ce métissage linguistique et l’intensification des échanges littéraires, intellectuels et artistiques, ce qui a créé une relation solide et diversifiée qui a influencé la création en général, soit indirectement, à travers la découverte de mouvements et de courants novateurs en poésie, en roman, en nouvelle, au théâtre, dans les arts visuels et dans les médias, en particulier la presse, soit directement, à travers la langue française, ce qui a enrichi ces créations littéraires et médiatiques, et a facilité l’émergence d’une catégorie ou d’un groupe qui maîtrisait la langue française et l’a élevée à un niveau tel qu’ils ont excellé dans la création littéraire, certains apportant même des innovations créatives qui ont valu des éloges de la part des hommes de lettres et de pensée en France, comme l’a souligné le Dr. Ahmed Osman dans son livre « Francophones et Égyptiens ».
"Il est donc indispensable de présenter quelques-uns de ces noms littéraires égyptiens qui ont marqué la scène culturelle française par leurs écrits poétiques, romanesques, nouvelles et théâtrales, et qui ont rivalisé en créativité avec les écrivains français eux-mêmes. Étant donné la longueur de la liste, nous nous limiterons à quelques noms, à titre d'exemple, tels qu'Ibrahim Rateb, poète et diplomate, le poète et artiste Mohamed Kheir qui a publié plusieurs recueils de poèmes en français, ainsi que le poète Foulad Yaken qui a collaboré avec Mohamed Kheir à la rédaction de « Al-Majalla al-Misriyya » (La Revue égyptienne), une revue en langue française.
Parmi les autres noms figurent le poète Mohamed Zawalqar, l'un des fondateurs de « Majallat al-Qahira » (La Revue du Caire), ainsi que le poète et nouvelliste Ahmed Rassem, la poétesse et écrivaine Doria Shafik, à qui l'on doit le droit de vote et d'éligibilité des femmes égyptiennes, Carole Naggar, poétesse et journaliste, Hinin Arqach, Joyce Mansour et Nelly Zanzaniry, toutes deux poétesses et dramaturges. On trouve également sur cette liste Henri al-Qaïm, André Chédid, et Mounis Taha Hussein (neveu du doyen de la littérature arabe). Parmi les plus importants figure également Georges Henein, qui a contribué à la diffusion du surréalisme en Égypte et qui était un ami proche d'André Breton et de Simone de Beauvoir. Il a également lancé « Al-Majalla al-Jadida » (La Nouvelle Revue) avec un autre poète écrivant en français, Edmond Jabès, qui a ensuite fondé les magazines « Jeune Afrique » et « Le Nouvel Observateur ». Et bien d'autres noms encore, qui ont fait l'objet d'études approfondies sur le sujet.
Notez ce sujet